Afrique du sud: 3ème épisode

En juin dernier, Marine Drouilly nous avait fait parvenir l’avancée de ses travaux sur le Karoo Predator Project avec un article consacré aux piégeage photographique. Voici les dernières nouvelles de l’étude qu’elle mène en Afrique du sud.

Relire le premier article de mars 2013

Relire le second article de juin 2013

La Réserve naturelle d’Anysberg possède de vastes vallées entourées de montagnes de moyenne altitude (entre 1200 et 1600 mètres) séparées par de profondes gorges, trois habitats idéals pour le chacal à chabraque, le léopard et le caracal.

La Réserve naturelle d’Anysberg possède de vastes vallées entourées de montagnes de moyenne altitude (entre 1200 et 1600 mètres) séparées par de profondes gorges, trois habitats idéals pour le chacal à chabraque, le léopard et le caracal.

Marine Drouilly:

Premier caracal équipé d’un collier GPS – vers une meilleure compréhension de l’espèce

Après avoir obtenu les images des pièges photographiques placés dans les fermes, le Karoo Predator Project est en train de reproduire le même protocole dans une aire protégée adjacente, la Réserve Naturelle d’Anysberg. La Réserve est composée d’anciennes fermes qui ont été rachetées par le WWF-Afrique du Sud pour protéger la grande diversité végétale, en partie endémique, de la région et rétablir sa population naturelle d’herbivores (oryx, élands du Cap, zèbres de montagnes notamment). La comparaison entre fermes et aire protégée va permettre d’établir l’impact de l’élevage de moutons et des différents types de contrôles des prédateurs sur la biodiversité en mammifères et oiseaux terrestres.

Empreintes de léopard au sein de la Réserve naturelle d’Anysberg.

Empreintes de léopard au sein de la Réserve naturelle d’Anysberg.

Le 15 octobre dernier, un coup de téléphone inattendu me tire de mon travail dans la Réserve. Un des fermiers de ma zone d’étude m’informe qu’il a capturé un caracal dans une cage. La capture de prédateurs par cette méthode est un des moyens de « contrôle » utilisés par les fermiers pour se débarrasser de ces espèces. Je ne suis pas encore sensée poser de collier GPS sur les prédateurs (seulement en 2014), mais j’ai déjà 4 colliers avec moi, et l’effort déployé par le fermier pour me contacter me décide. C’est un grand pas en avant. Pour la première fois dans la région, un fermier, de lui-même, demande à ce qu’un prédateur soit relâché au sein de sa ferme avec un collier GPS plutôt que tué. Je rappelle qu’il n’y a pas de système de compensation des pertes dues aux prédateurs en Afrique du Sud. Le fermier est conscient des risques et

a fait son choix. Tout le district est bientôt au courant et Freedom*, le mâle caracal équipé du collier, devient bientôt le sujet de conversation de la région, et le discours est positif ! (*Liberté en anglais)

Marine pose un collier GPS sur Freedom, le mâle caracal capturé au sein d’une ferme en octobre dernier. Le caracal est également réhydraté par voie intraveineuse

Marine pose un collier GPS sur Freedom, le mâle caracal capturé au sein d’une ferme en octobre dernier. Le caracal est également réhydraté par voie intraveineuse

Le collier posé sur le caracal est un collier à technologie Iridium. Je reçois les données de position du caracal par emails plusieurs fois par semaine et peux prévenir les fermiers lorsque l’animal change de ferme par exemple. C’est le collier le plus léger du marché avec cette technologie et il est équipé d’un mécanisme de « drop-off » qui lui permet de se détacher de l’animal à une date prédéfinie par le chercheur. Cela évite d’avoir à recapturer le caracal et minimise ainsi le stress.

Le caracal Freedom est relâché, muni de son collier pour quelques mois. Il ne demande pas son reste et disparaît vite dans un lit de rivière asséché.

Le caracal Freedom est relâché, muni

de son collier pour quelques mois. Il ne demande pas son reste et disparaît vite dans un lit de rivière asséché.

Les premiers résultats de la vie de Freedom montre qu’il utilise principalement les zones montagneuses des fermes en se cantonnant aux gorges et aux lits de rivières asséchés entre les montagnes. Cela correspond aux zones où j’avais trouvé le plus de fécès pour l’espèce. Par ailleurs, il n’a pas parcouru de grande distance et se trouve actuellement à seulement 4,6 km de son point de relâcher. Il utilise pour le moment une assez petite zone (loin des moutons !) où il semble trouver assez de nourriture. La présence de groupements de points GPS – pris toutes les heures – laissent penser à des sites où le caracal s’est nourrit. Lorsqu’il aura quitté cette zone, j’irai explorer les groupements de points et chercherai les éventuels restes de carcasses pour en apprendre davantage sur ses habitudes alimentaires. Je pense déjà y retrouver des restes de damans des rochers et de lièvres des rochers.

J’espère vous redonner des nouvelles de Freedom plus détaillée lors du prochain article. Entre temps, si vous avez des questions ou des suggestions, n’hésitez pas à me contacter: drouillymarine@yahoo.fr